Éditorial : Un millésime océanique au souffle frais !

Le millésime 2024, marqué par un mildiou sévère, a surpris par sa fraîcheur océanique et son équilibre subtil. Malgré les inquiétudes initiales et les défis sanitaires, nous avons dégusté pendant les Primeurs des rouges expressifs, des blancs vibrants et des liquoreux éclatants. Ce millésime invite à redécouvrir la finesse et la maîtrise du terroir, loin des excès.

13 mai 2025
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Éditorial

Un millésime océanique au souffle frais !

Les mots de Mac Mahon étaient sur toutes les lèvres, lorsqu’on osait quémander une impression globale concernant 2024, suivis de près par l’évocation triste du champignon cryptogamique. Pourtant, au sortir de cette séquence primeurs marquée par une inquiétude générale où l’on semblait déjà se préparer au pire (presque par anticipation), on se surprend à disserter sur les réussites d’un drôle de millésime qui appela disruption et doigté pour être dompté. On nous a répété à l’envi que ce millésime avec des faibles degrés d’alcool réclamait que les jus soient choyés, les boisés peu appuyés, les tanins mûrs, et que l’on accepte une touche infime de végétal — la pyrazine souvent tolérée par les adorateurs du Cabernet franc ligérien. Dans le pire des cas, les prises de bois massives, les acidités fort présentes alliées à des tanins grossiers ont dénaturé les vins. Les bonnes copies rendues renvoyaient plus aux croquis sur l’os d’un jeune Rembrandt qu’à l’opulence d’un Botticelli. Une forme d’ascèse qui n’hypothèquerait en rien, soit dit en passant, la capacité de garde de quelques vins rencontrés. On nous a également répété à loisir qu’il fallait avoir respecté son terroir, sa capacité à livrer des raisins sains et aussi mûrs que le permettait ce millésime. On note que les terroirs d’argile ont globalement mieux encaissé les conditions climatiques du 2024, avec des Cabernets ramassés après le 5 octobre qui ont pu profiter de belles fenêtres d’ensoleillement. Le mildiou « total » a obligé à des tris soignés. L’équipe de Derenoncourt Vignerons Consultants a rappelé que « la maîtrise de l’état sanitaire a souvent guidé la décision de récolte, l’étape cruciale d’un tri méticuleux des raisins harmonise la qualité de la vendange à l’entrée du chai. Cette précision a permis de réduire les sensations végétales et de profiter de la belle maturité des pépins ». Les blancs secs et les liquoreux s’avèrent d’une fraîcheur étonnante, à condition d’avoir su gérer l’équilibre acide. Comme l’ont encore souligné les techniciens de Derenoncourt Vignerons Consultants « les blancs ont profité de belles conditions de maturation. Ils offrent des nez explosifs, une maturité aboutie, révélant une palette aromatique généreuse et diversifiée. »

Au global, on a dégusté des vins rouges expressifs et avenants, dominés par des arômes de fruits frais, des nuances florales et des épices délicates. Dans la plupart des cas, on a pu rencontrer des trames tanniques sveltes et plutôt étirées. En somme, il fallait avoir dégusté avant que de commenter et bien souvent d’enterrer un millésime tout en fraîcheur incisive. Transformons-nous en Sisyphe et clamons à chaque fois qu’il le faudra qu’il s’agit d’un millésime de fraîcheur océanique et de reconquête.

Comme l’année dernière, Féret livrera ses notes et ses commentaires à la suite de la longue campagne de dégustation des Primeurs 2024 (7 au 17 avril). Le collège d’experts dégustateurs était composé de Bernard Grandchamp, d’Étienne Khemtémourian, de Gianni Degl’Innocenti, et de Yves Raymond.

🤝 Nouveau partenariat : ces notes et ces commentaires Féret seront relayés dans le magazine Sommeliers International à paraître d’ici la fin du mois de juin.

Fidèlement vôtre,

Henry Clemens, directeur de publication

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La campagne 2023 fut intense et soutenue, dans la mesure où les sorties plus précoces se sont effectuées à un rythme très rapproché chez bon nombre de têtes d'affiche et autres « stars », suscitant un peu d'excitation. Cette campagne des primeurs a été plus ramassée et dense que 2022 qui s'étira quant à elle sur deux mois. Comme rappelé par M. Bernard, du groupe Millésima, le contexte économique particulier d'inflation et de ralentissement économique « génère une incertitude qui incite inéluctablement les consommateurs et les investisseurs à être plus prudents ». Sous entendant que les prix seront globalement revus à la baisse, aux vues du niveau des stocks chez les importateurs, les distributeurs et les cavistes ou encore de la baisse des ventes sur les principaux marchés exports. Ce qui, au regard de la qualité et du volume du millésime, devrait susciter un regain d'attractivité et redonner le sourire aux consommateurs et aux producteurs.

Présentation de nos dégustateurs lors des primeurs 2023