Millésime 2025, de belles promesses…

L’été brûlant et les pluies irrégulières n’ont pas empêché la vigne de s’exprimer pleinement. Les premières vinifications témoignent d’un millésime riche, harmonieux et plein de finesse.

3 décembre 2025
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Si l’on se réfère à la croyance selon laquelle les millésimes finissant par le chiffre 5 portent le sceau d’une grande année, 2025 semble y adhérer sur la foi des raisins récoltés, beaux mais peu abondants. En s’abstrayant de son contexte économique, Bordeaux a donc de quoi être satisfait d’une année viticole qui s'est pourtant déroulée dans une ambiance de chaleur et de sécheresse uniques. Ce contexte a quelque peu bouleversé les cycles successifs de la vigne, depuis sa croissance jusqu’à sa maturation, partageant une précocité jamais vue. Maintenant que les vinifications sont entièrement terminées, y compris pour les liquoreux, et que la nature des vins s’est révélée, tous les indices nous portent au pronostic d’un grand millésime. Retour sur une année au déroulement surprenant, témoin du changement climatique.

 

Une sécheresse sans précédent

On peut d’emblée souligner son exception en matière de précipitations, car si la période de dormance de la vigne (automne – hiver 2024/2025) n’a pas été significativement sèche, le cumul des pluies s’est avéré sensiblement inférieur à la moyenne des 25 dernières années (typiquement moins 112 mm à l’instar du secteur de Pessac). En nette rupture avec cette tendance, le mois d’avril a été particulièrement arrosé, qui plus est par des pluies concentrées sur le week-end de Pâques où il est tombé jusqu’à 100 mm par endroits. Survenues à propos pour réalimenter les sols, les précipitations se sont faites ensuite bien rares, car l’ensemble du Bordelais n’a enregistré que 75 mm en moyenne entre la mi-mai et la mi-juillet, caractérisant un millésime remarquablement sec. C’est pourquoi les pluies survenues autour du 20 juillet ont pris un caractère providentiel en ayant permis à une véraison qui temporisait jusque-là de s’accomplir. Il en a été ainsi pour celles de la fin août — début septembre, dont l’action a été pour le moins bénéfique, interrompant un cycle de chaleurs et la sécheresse qui lui était inhérente. Si ces précipitations tardives et peu abondantes n’ont pas eu d’incidence sur un bilan hydrique en fin de compte très déficitaire, elles ont tout de même permis de réguler le processus de maturation.

 

Des pics de chaleur à 42 °C !

Relativement doux dans son ensemble, l’hiver l’a été surtout au mois de février au point de favoriser un débourrement très précoce, commencé dès la fin mars dans certains secteurs et imprimant déjà ce caractère au millésime. Son cycle s’est malgré tout déroulé dans de bonnes conditions hydriques et thermiques, s’avérant alors homogène et qualitatif. Un même contexte a favorisé la floraison, apparue dès la mi-mai avec un développement rapide grâce à des températures relativement élevées. Cette tendance chaude s’est accentuée au début de l’été, entre la mi-juin et la mi-juillet, excédant de 4 °C les normales saisonnières enregistrées depuis 2003. Ainsi renforcée, la précocité du millésime a vu les premiers signes de véraison apparaître début juillet, pour connaître ensuite un ralentissement, faute de pluies. Celles-ci viendront heureusement à la rescousse pour permettre au cycle de s’accomplir, comme indiqué plus haut. Cette courte pause pluviale n’a en rien interrompu le règne de la chaleur, puisque la première quinzaine d’août a connu une période caniculaire de 10 jours, la plus longue constatée depuis 2003 et avec des pics de température enregistrés à 42 °C. Cela dit, les fortes amplitudes thermiques jour/nuit pendant cet intervalle, dépassant en moyenne les 15 °C, ont eu pour heureuse conséquence d’éviter au millésime un caractère « solaire » tant redouté.  

 

Des vendanges très précoces et saines

D’une précocité à valeur historique, avec un départ le 12 août, les dates des vendanges rappellent, en les précédant de quelques jours, celles de 2022, un millésime qui s’en rapproche sur d’autres aspects. Si cette date symbolique vaut en fait pour les blancs destinés aux crémants, ceux employés pour les vins tranquilles ont été récoltés un peu plus tard, en bonne partie dans le courant du mois d’août. Quant aux merlots, les tout premiers parvenus à maturité ont été ramassés le 3 septembre, date exemplaire pour attirer l’attention sur une situation sans précédent à Bordeaux. Les cabernets n’ont pas été en reste en matière de précocité, puisque vendangés presque dans la foulée. En considérant les caractères extrêmes du millésime, on peut dire que l’état sanitaire des raisins n’en a pas souffert outre mesure avec une absence constatée de grains échaudés ou flétris avant l’heure. Seule la taille des baies s’en est trouvée rapetissée, occasionnant de la sorte de plus faibles rendements, qu’il faut également attribuer à une moindre fertilité d’une vigne, portant les stigmates d’une année 2024 bouleversée par les intempéries.   

 

Quels raisins… Quels vins ?

Pour les rouges, un constat majeur est que le profil des raisins ne s’est pas ressenti d’un tel millésime autant qu’on aurait pu le craindre a priori. En effet, a contrario de ce que l’on pouvait appréhender, les baies ne présentaient pas de signes de sur-maturité ni ne recelaient un potentiel alcoolique excessif. Fruits d’une maturation aboutie, malgré son déroulement rapide, ils ont satisfait tous les critères attendus en matière de couleur, d’arômes et de tanins pour espérer des expressions complètes. Les premières vinifications le confirment d’ailleurs par une traduction plus que satisfaisante de ces facteurs, un constat fait à une large échelle et laissant percevoir une homogénéité du millésime.  

 

Quant aux raisins blancs, la plupart d’entre eux ont été récoltés au mois d’août, avant les pluies tombées à la fin du mois puis en début septembre ; pour autant, il ne semble pas qu’il y ait eu de distinction flagrante entre ceux ramassés avant ou après cet épisode. Sauvignon et sémillon ont été pratiquement logés à la même enseigne, avec pour dénominateur commun, de très faibles rendements. Cette dernière remarque vaut a fortiori pour ceux destinés aux liquoreux, qui ont grandement bénéficié du climat ambiant du mois de septembre, parcouru par quelques précipitations ayant favorisé l’apparition d’une pourriture noble aussi précoce qu’exceptionnelle en qualité.

Mohamed Boudellal

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La campagne 2023 fut intense et soutenue, dans la mesure où les sorties plus précoces se sont effectuées à un rythme très rapproché chez bon nombre de têtes d'affiche et autres « stars », suscitant un peu d'excitation. Cette campagne des primeurs a été plus ramassée et dense que 2022 qui s'étira quant à elle sur deux mois. Comme rappelé par M. Bernard, du groupe Millésima, le contexte économique particulier d'inflation et de ralentissement économique « génère une incertitude qui incite inéluctablement les consommateurs et les investisseurs à être plus prudents ». Sous entendant que les prix seront globalement revus à la baisse, aux vues du niveau des stocks chez les importateurs, les distributeurs et les cavistes ou encore de la baisse des ventes sur les principaux marchés exports. Ce qui, au regard de la qualité et du volume du millésime, devrait susciter un regain d'attractivité et redonner le sourire aux consommateurs et aux producteurs.

Présentation de nos dégustateurs lors des primeurs 2023