Carte blanche à Yves Raymond : Un classement et quelques questions

Une rubrique pour laisser le libre champ à une parole que nous espérons détonante, inspirée et inspirante. Nous donnons une « Carte Blanche » à Yves Raymond, fin connaisseur de la chose médocaine, qui revient ici sur le nouveau classement des Crus Bourgeois.

10 mars 2025
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CRUS BOURGEOIS, 150 ANS D’HISTOIRE ET UN NOUVEAU CLASSEMENT

 

Ce nouveau classement 2025 des crus bourgeois est l’aboutissement d’une histoire vieille de plus de 150 ans.

Très innovante, l’édition 1868 du Féret met pour la première fois  à la portée des amateurs la classification des vins du Médoc telle qu’utilisée depuis longtemps par les professionnels. On y retrouve au sommet bien sûr les crus classés puis viennent les crus bourgeois supérieurs, les crus bourgeois et enfin, les crus artisans et paysans.

En 1932, une classification est élaborée par les cinq courtiers les plus respectés de Bordeaux et elle fait référence. Elle distingue 339 crus bourgeois, 99 crus bourgeois supérieurs et crée une nouvelle catégorie : les crus bourgeois exceptionnels. Cette dernière catégorie réduite à seulement six membres a été rendue nécessaire par l’évolution des cours et de la notoriété de ces six propriétés qui sont alors, par leur prix de vente et leur réputation, des équivalents crus classés. 

Le classement de 2003 sera fondé grosso modo sur les mêmes bases que celui de 1932. Le jury comprend toujours les courtiers les plus renommés mais il a été fortement élargi. On y retrouve les plus prestigieux professeurs d’œnologie à l’image de Denis Dubourdieu comme les négociants les plus estimés. Ce classement distingue neuf crus bourgeois exceptionnels. Ceux-ci, comme les six du classement de 1932, sont pour la plupart des équivalents crus classés. Mais ce dernier classement est annulé en 2007 car il déroge aux règles du droit en ce qu’il n’a pas prévu de procédure d’appel.

Après une période de 13 ans pendant laquelle l’utilisation de « cru bourgeois » reste autorisée mais sans qu’il y ait de hiérarchie, une nouvelle classification hiérarchisée voit le jour en 2020. Elle comprend toujours les trois catégories : bourgeois, supérieurs et exceptionnels mais elle est élaborée selon des principes radicalement différents des précédents classements. Ceux-ci étaient principalement fondés sur le résultat des mercuriales constatées par les professionnels ; le nouveau classement est réalisé sous l’égide de l’INAO et selon ses principes habituels. Pour garantir son indépendance, le jury est composé de personnes provenant des autres régions viticoles de France et d’autre part, les prix de vente des vins ne rentrent plus du tout en ligne de compte. À la place, un cahier des charges complexe est établi. Il comprend deux notes : une note de dégustation établie par un jury de professionnels et une note des caractéristiques de la propriété autour de dix critères. Le mélange des deux notes donnera son rang à la propriété.

Les équivalents crus classés dont nous parlions plus haut se satisfont de la reconnaissance du marché qui, de fait, les place au sommet de la hiérarchie. Ils considèrent que le classement actuel d’une part, ne leur apporterait rien de plus et d’autre part, que la procédure s’est trop éloignée de l’esprit originel des crus bourgeois. Ils n’ont donc candidaté ni au classement 2020 ni à celui de 2025. Dès lors se posait la question de savoir s’il fallait maintenir le niveau hiérarchique des exceptionnels. La réponse fut positive. Il ne faut donc pas confondre les exceptionnels actuels avec ceux de 1932 ou de 2003. La catégorie des exceptionnels dans son acception actuelle est tout de même très intéressante en ce qu’elle met un coup de projecteur sur des propriétés très méritantes et élaborant des vins de grande qualité.

Le nouveau classement des crus bourgeois a été dévoilé le 10 février à l’occasion de Wine Paris. Il recense 120 crus bourgeois au lieu de 180 en 2020, 36 crus bourgeois supérieurs au lieu de 56 et le même nombre de crus bourgeois exceptionnels, 14. Jetons un œil sur la catégorie reine: les crus bourgeois exceptionnels. On y retrouve des marques reconnues de longue date comme Le Crocq, Malescasse et Malleret mais aussi des vignobles auparavant négligés et repris en main de belle façon comme Laffite Carcasset. La lumière mise sur ces crus est bien méritée.

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La campagne 2023 fut intense et soutenue, dans la mesure où les sorties plus précoces se sont effectuées à un rythme très rapproché chez bon nombre de têtes d'affiche et autres « stars », suscitant un peu d'excitation. Cette campagne des primeurs a été plus ramassée et dense que 2022 qui s'étira quant à elle sur deux mois. Comme rappelé par M. Bernard, du groupe Millésima, le contexte économique particulier d'inflation et de ralentissement économique « génère une incertitude qui incite inéluctablement les consommateurs et les investisseurs à être plus prudents ». Sous entendant que les prix seront globalement revus à la baisse, aux vues du niveau des stocks chez les importateurs, les distributeurs et les cavistes ou encore de la baisse des ventes sur les principaux marchés exports. Ce qui, au regard de la qualité et du volume du millésime, devrait susciter un regain d'attractivité et redonner le sourire aux consommateurs et aux producteurs.

Présentation de nos dégustateurs lors des primeurs 2023